Le portage salarial, une solution face aux difficultés d’embauche des seniors ?
Un allongement de carrière problématique dans un contexte de faible taux d’emploi des seniors
Désireux de mettre la réforme des retraites en œuvre à l’été 2023, le chef de l’État veut faire voter un projet de loi sur ce dossier épineux avant la fin de l’hiver. Élisabeth Borne a ainsi lancé les discussions avec les organisations syndicales et patronales début octobre sur la question de l’emploi des seniors. Le principal changement voulu par le président est l’allongement de la durée de la carrière jusqu’à 65 ans.
Or, à partir de 50 ans, les travailleurs ont le plus grand mal à conserver leur emploi ou à en retrouver un. C’est d’ailleurs le premier point d’achoppement avec les partenaires sociaux. Car les entreprises ont plutôt tendance à encourager le départ précoce à la retraite afin d’alléger leur masse salariale. Les moyens utilisés sont d’ailleurs multiples : plans sociaux, rupture conventionnelle, licenciement…
Les chiffres de l’activité des seniors français en disent long. Seulement 35,5 % des 60-64 ans exercent encore leur métier au sein d’une entreprise. D’après les données de l’OCDE, en 2021, le taux d’emploi des 55-64 ans en France n’est que de 56 %, 4,5 points en dessous de la moyenne de la zone euro et 15,9 points de moins que l’Allemagne et même 19 points d’écart négatif par rapport à la Suède.
Et malgré les difficultés de recrutement auxquelles les entreprises font face depuis plusieurs mois, les préjugés culturels ont la dent dure. Les seniors sont considérés comme des employés :
- couteux,
- peu flexibles,
- difficiles à manager,
- incapables de s’intégrer rapidement avec leurs cadets,
- technophobes et moins productifs.
Et leurs difficultés actuelles à recruter ne semblent pas les pousser à changer de credo. Pourtant, selon les spécialistes, une évolution des mentalités s’impose : c’est maintenant qu’il faut en finir ensemble avec le « déni de vieillesse » et le gâchis de la main-d’œuvre expérimentée.
Les recruteurs soulèvent également les réticences des dirigeants à qui ils proposent un candidat senior. 40 % parmi ces derniers refusent de tels profils avant même de les avoir reçus en entretien. Et même après avoir franchi cette étape clé, un quart des prétendants âgés sont écartés. 76 % des recruteurs se disent ainsi favorables à un dispositif légal contraignant destiné à forcer les entreprises à prendre des seniors pour étoffer leurs équipes.
Les réticences des entreprises à garder ou à embaucher des seniors
Repousser l’âge de départ à la retraite de personnes qui ne sont plus en activité risque donc d’aggraver la précarité des seniors. C’est la raison de l’opposition des syndicats à cette proposition gouvernementale.
Les concernés semblent en effet parfaitement disposés à poursuivre leur carrière, sans tenir compte d’éventuels obstacles liés à l’âge. Selon une récente étude, 76 % des candidats à l’embauche sont prêts à occuper une autre fonction afin de s’adapter aux besoins de l’entreprise. La même proportion accepterait une diminution de leur salaire.
Cette année, rejoignant une initiative lancée par L’Oréal et le Club Landoy, un groupe de réflexion sur la démographie, 32 grands groupes français s’engagent pour favoriser l’emploi des plus de 50 ans, quand la majorité les fait partir en priorité en cas de réduction des effectifs. La charte dédiée comprend dix engagements, notamment la montée en compétence de ces publics, la sensibilisation de tous les collaborateurs, ainsi que l’embauche « à toutes les étapes de la carrière ».
Les pistes du gouvernement pour doper l’emploi des seniors
Depuis des décennies, les administrations successives ont imaginé différents dispositifs visant à lutter contre les discriminations à l’embauche des seniors et à les maintenir dans l’emploi. Olivier Dussopt, le ministre du Travail, du Plein-emploi et de l’Intégration, a ainsi présenté les pistes envisagées par le gouvernement Borne :
- la révision de la durée maximale d’indemnisation des chômeurs, qui augmente à 36 mois au lieu de 24 mois à partir de 55 ans, mesure qui selon lui, encourage les entreprises à faire partir les seniors ;
- davantage d’investissement dans la prévention et la réduction des départs anticipés par l’amélioration des conditions de travail ;
- le renforcement de la formation et de la reconversion des salariés âgés ;
- la promotion de la retraite progressive et du cumul emploi-retraite ;
- la mise en place d’un index professionnel de l’emploi des seniors dans les entreprises, inspiré du modèle créé pour l’égalité femmes-hommes. Cet outil tiendrait compte de différents paramètres : le taux de recrutement et de formation d’individus âgés de plus de 45 ans, l’utilisation de dispositifs de retraite anticipée, etc. ;
- l’autorisation du cumul d’une partie de l’allocation chômage pour un senior qui occupe un emploi moins bien rémunéré afin de compenser la baisse de revenus.
Les options retenues devraient être connues au cours des prochaines semaines, la Première ministre s’étant engagée à communiquer un bilan des concertations avec les partenaires sociaux avant les fêtes.
En attendant des améliorations, les seniors qui ne parviennent pas à décrocher un poste salarié peuvent mettre leur expertise et leur expérience à profit en se mettant à leur compte. S’ils redoutent la précarité sociale des indépendants, mis en lumière par la crise sanitaire, l’idéal serait de passer par une société de portage salarial. En leur faisant signer un contrat de travail, celle-ci leur donne accès au statut de salarié, avec les avantages sociaux qui s’y rapportent :
- assurance maladie,
- prévoyance,
- mutuelle santé,
- cotisation retraite,
- indemnité chômage,
- formation professionnelle.
De plus, elle s’occupe de tout l’aspect administratif relatif à la gestion de leur activité, ce qui leur permet de se consacrer pleinement à la réalisation de leurs missions. Enfin, ils peuvent travailler à leur rythme, à temps partiel ou à plein temps, en fonction de leur disponibilité et leurs souhaits. Le contrat de travail passé avec la société de portage n’implique aucun lien de subordination pour le travailleur « porté ».
Ce contenu a été réalisé en partenariat avec ABC Portage. La rédaction de BFMTV n'a pas participé à la réalisation de ce contenu.
Sources : Les Echos, Novethic, Libération