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IA, Tiktok, cloud: A quoi pourrait ressembler le programme numérique du Rassemblement national

Jordan Bardella sera candidat au poste de Premier ministre en cas de victoire du RN aux élections législatives anticipées. Cloud souverain, intelligence artificielle... Voici ce que pourrait être son programme numérique.

Vers une place à Matignon? En demandant à Emmanuel Macron de dissoudre l'Assemblée nationale après sa victoire aux élections européennes, Jordan Bardella a renouvelé son envie de devenir Premier ministre. L'eurodéputé Rassemblement national (RN), qui a obtenu 31% des suffrages ce dimanche 9 juin, se rêve en chef de gouvernement si son parti remporte les élections législatives anticipées prévues le 30 juin et 7 juillet prochains.

Mais que propose Jordan Bardella pour le numérique? Régulation des Gafam, cloud souverain, champions de l'IA... Tech&Co a décortiqué les mesures proposées par la tête de liste du RN aux élections européennes de dimanche 9 juin et certaines de ses déclarations pour comprendre ce que pourrait être le programme numérique du RN en cas de victoire.

Souveraineté numérique et régulation des Gafam

Sur la question sensible des données personnelles et, plus précisément, de l’hébergement en ligne dans le cloud, Jordan Bardella prône la souveraineté numérique face à l'hégémonie d’Amazon, Microsoft et Google dans le cloud.

L'eurodéputé souhaite développer des coopérations industrielles et techniques sur les grands projets d'avenir, comme la constitution d’un "cloud souverain européen" pour stocker les données stratégiques des entreprises et services publics français. Le RN l'oppose à un simple "cloud de confiance", "perméable aux ingérences juridiques américaines et chinoises". Un véritable défi technologique, car pour l’heure, les alternatives françaises ou européennes sont encore peu nombreuses face aux services développés par les géants américains.

Depuis 2022, le parti d'extrême droite prône aussi une forte régulation des Gafam et de leurs équivalents chinois. Lors de l'élection présidentielle de 2022, Marine Le Pen promettait même de les "démanteler" si besoin.

L'ex-candidate critiquait ainsi la "force morale et politique" des Big tech "entrant en concurrence directe avec nos États", soulignait-elle dans un entretien au Point en novembre 2021. Elle souhaitait ainsi mettre fin à la "censure" des grands réseaux sociaux afin que seul un juge puisse décider du retrait d'une publication.

De la même manière, elle promettait la manière forte, si besoin, pour contenir les géants du numérique.

"Nous n’hésiterons donc pas à les démanteler, s’il existe des acteurs européens capables de les remplacer, ou si ce démantèlement peut permettre leur déploiement" assurait-elle alors.

Avant une telle extrémité, Marine Le Pen évoquait néanmoins un panel de mesures comme l'obligation de "conserver et traiter les données des Européens en Europe".

Interrogé récemment par Tech&Co, le RN semble avoir un peu adouci son discours, du moins sur la question d'une éventuelle interdiction de Tiktok dans l'Union européenne qui n'est pas envisagée à l'heure actuelle. Pas question donc d'interdire l'application chinoise, comme le réclament d'autres partis.

Le RN mentionne toutefois la nécessité pour "la puissance publique" de "se positionner sur ce dossier pour prévenir les nombreux risques liés aux réseaux sociaux, comme le contrôle par des puissances étrangères, les données personnelles ou l'addiction pour les plus jeunes".

Miser sur l'IA

Mais le vrai cheval de bataille de Jordan Bardella sur le numérique, c'est l'intelligence artificielle (IA). "L'Europe ne peut pas se permettre de n’être que le spectateur passif de la quatrième révolution industrielle, marquée notamment par l’essor de l’intelligence artificielle", précise le programme du candidat aux Européennes, tout en condamnant l'excès de régulation et en insistant sur l'importance d'une "indépendance technologique".

En avril dernier, lors d’une soirée organisée par l’hebdomadaire Valeurs actuelles, Jordan Bardella mettait déjà en garde contre "l’esprit de régulation tel qu’excessivement proposé par l’Union européenne", rappelle Le Monde.

Il y voit "un frein majeur, une régression énorme", par rapport aux politiques des Etats-Unis et de la Chine. Ses pistes: augmenter le budget public de la recherche et faire émerger des champions européens via la commande publique.

Champions européens du numérique

Dans son programme aux européennes, le candidat RN précise donc vouloir revoir les règles de concurrence pour permettre la constitution de "champions européens du numérique". L'objectif du parti est de favoriser la concentration des entreprises, afin de permettre aux sociétés européennes de la tech de grossir.

Jordan Bardella souhaite également assouplir les règles d'accès aux Projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC) pour favoriser l'IA.

Si l'eurodéputé croit en l'IA, il semble conscient de ses dérives et notamment des risques de désinformation liés aux deepfakes. Le président du RN avait appelé en avril à une "régulation" des faux comptes sur les réseaux sociaux. "Il faut réfléchir à une législation qui puisse nous permettre de protéger le débat démocratique de la multiplication de ces deepfakes".

L'eurodéputé ambitionne également de combler les dépendances stratégiques de la France dans le domaine de la Défense. Pour cela, le RN souhaite que l'Europe technologique "aide les forces armées nationales à se doter d’applications et de solutions ne soufrant d’aucune dépendance critique".

Salomé Ferraris