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Féminicide aux assises de Strasbourg: Yasemine avait "compris qu'elle était en danger"

La justice représentée. (Photo d'illustration)

La justice représentée. (Photo d'illustration) - Michael Coghlan - CC - Flickr

L'homme âgé de 45 ans est accusé d'avoir étranglé son ex-compagne devant leurs enfants en 2020, après des années de violences conjugales. Son procès a débuté ce mardi 21 mai et se conclura mercredi devant la cour d'assises de Strasbourg.

Une jeune femme "joyeuse", déterminée à s'éloigner de son conjoint car elle avait "compris qu'elle était en danger": les proches de Yasemine Cetindag, étranglée à 25 ans par son ex-compagnon en 2020, ont laissé entrevoir sa personnalité ce mardi 21 mai devant la cour d'assises du Bas-Rhin.

"C'était une bonne vivante, elle rigolait tout le temps", mais "je savais qu'il y avait de la violence dans le couple" a décrit sa mère, très émue.

Ce conjoint, "quand elle l'a connu elle était très jeune", "à 16 ans on est vulnérable, on se laisse influencer", a retracé sa mère. Le couple a eu quatre enfants de manière très rapprochée, nés entre 2013 et 2018.

Elle a raconté avoir vu plusieurs fois sa fille blessée par son ancien conjoint, une fois portant des lunettes de soleil. "Je pensais qu'elle était devenue aveugle d'un oeil", une autre fois avec des points de suture. "Je lui disais 'laisse-le, un jour il te tuera'".

Face à cet ex-conjoint, Yasemine "ne se laissait pas faire, elle rétorquait, elle se défendait comme elle pouvait", a encore dit sa mère.

Petit à petit, "elle a mûri, elle a compris qu'elle était en danger". Quelques mois avant d'être tuée, sa mère assure que la jeune femme "voulait s'éloigner de toute cette violence et être enfin tranquille".

"Elle était heureuse de commencer une nouvelle vie, un nouveau départ, pressée de quitter son appartement. Elle n'a jamais eu le temps. Tout s'est arrêté le 23 décembre", a dit sa mère.

"Je voulais aider maman"

Ce jour-là, après une nouvelle dispute, son ex-conjoint l'étrangle sous les yeux de leurs enfants, avant d'enterrer son corps dans une forêt au nord de Strasbourg.

Selon la mère de Yasemine, cet homme avait plusieurs fois menacé de mort la jeune femme, lançant à sa mère quelques mois avant le drame: "Ta fille, je vais lui faire un truc de fou".

La soeur aînée de la victime explique elle aussi que sa cadette était une fille "toujours souriante, toujours joyeuse, pleine de vie". Elle "voulait du renouveau, et pas avec lui", dit-elle en référence à l'accusé.

Devant la cour, elle a évoqué un message vocal que lui avait laissé sa soeur deux mois avant sa mort, dans lequel celle-ci lui confiait: "Quand il n'est pas là, je suis heureuse. Je veux juste une chose, être heureuse avec mes enfants".

Ses enfants assisteront à sa mort, confiant ensuite à leur grand-mère: "papa a fait bobo à maman", "il a sorti le foulard, il a serré le cou de maman", a raconté celle-ci. Leur grand-père maternel est aujourd'hui leur tuteur légal.

La tante de la victime a décrit des enfants "perdus" et "impuissants" après ce drame survenu juste avant Noël. "Moi je voulais l'aider maman, mais (papa) m'a dit 'Rentre dans ta chambre'", lui a confié un des enfants.

L'accuse brièvement exclu de la salle d'audience

Le réveillon de Noël 2020 devait justement marquer symboliquement la séparation, après dix années de relation chaotique. Yasemin "avait acheté les cadeaux seule", "il était "hors de question" que son compagnon soit présent, se remémore son amie proche, Solène Paglierani.

La jeune femme avait pris la peine de faire changer ses serrures. Elle avait aussi sollicité son bailleur social pour obtenir un nouveau logement. "C'est bien, il ne va pas me trouver", avait-elle confié à son concierge. Après de multiples séparations non abouties, celle-ci devait être définitive. Mais son compagnon "n'était pas d'accord, il n'aurait jamais accepté je pense", se remémore Solène Paglierani.

Dans son box, l'accusé ne semble pas prendre la mesure de la gravité des faits. Tout au long de la procédure, il n'a jamais exprimé "de regrets ou fait preuve d'empathie envers la victime ou ses enfants", souligne Emilie Mourette, brigadier de police.

Ce mardi, il a perturbé les débats à plusieurs reprises, jusqu'à être temporairement exclu de la salle d'audience par le président Antoine Giessenhoffer, pour préserver "la sérénité des débats".

A. La. avec AFP